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Tribune Libre : Déchets sur les plages, urgence et préconisations

Nous aborderons ici principalement les problèmes liés à la pollution, les causes, les conséquences et les solutions qui peuvent être apportées. On parle ici principalement des plages d'Antibes, du Cap d'Antibes et de Juan les Pins (la Gallice, les Ondes, la Garoupe, la Salis, le Ponteil, la Gravette...) Ces eaux côtières du littoral antibois sont situées sur un site Europa 2000. Il est nécessaire de préserver et de mettre en valeur ces sites classés. Le facteur d'unité est cependant le bassin Méditerranéen proprement dit. Il comprend les rives européennes, asiatiques et africaines.

Credit photo : Ioana Stoicescu @euphotica

TRIBUNE LIBRE

Par Arthur Meyer Abbatucci

Les chiffres de la pollution parlent d’eux-mêmes et sont alarmants. Chaque année, plus de 200 tonnes de déchets plastiques sont jetés dans la mer Méditerranée. 229 000 tonnes l’année dernière. Ce chiffre pourrait atteindre les 500 000 tonnes d’ici 2040 si rien n’est fait. (1) Il s’agit principalement de macro déchets qui flottent à la surface de l’eau. Les morceaux de plastiques se décomposent sous l’effet des rayons ultraviolets, de la salinité, du vent et du mouvement des vagues. La libération de ce plastique est de plus en plus problématique car les concentrations de micro plastiques atteignent ensuite des niveaux records : 1,25 milliards de fragments par kilomètre carré. (2)

Entre 8 et 12 millions de tonnes de plastique sont déversées chaque année en mer Méditerranée, 20% le sont en raison des activités de pêche et du trafic maritime tandis que 80% le sont du fait du largage par les fleuves et les rivières. La Méditerranée est pourtant le berceau de la civilisation, elle est en train de se transformer en une mer remplie de confettis de plastique. L’eau est un défi commun de l’humanité. 70% de notre planète est recouverte d’eau et l’on est nous-mêmes, êtres humains, composés à 60% d’eau.

Dans le département des Alpes-Maritimes, des associations fort heureusement se mobilisent pour nettoyer les plages. Le travail bénévole, les initiatives citoyennes si louables soient-elles ne doivent pourtant pas remplacer celui des collectivités, le rôle de l’action publique.

En Méditerranée, la concentration en plastique est quatre fois plus élevée que sur le 7ème continent, pourtant constitué uniquement… de plastique !

Le plastique constitue ainsi 95% des déchets en haute mer et les micro plastiques, c’est-à-dire des fragments plus petits et plus insidieux, atteignent ici des niveaux records. Rien d’étonnant à cela lorsque l’on sait que l’Europe est le deuxième producteur de plastique au monde après la Chine. Ce plastique peut contenir des substances toxiques concentrées jusqu’à un million de fois supérieures à celles présentes naturellement dans l’eau de mer. En Méditerranée, la concentration en plastique est quatre fois plus élevée que sur le 7ème continent, pourtant constitué uniquement… de plastique !

La plupart des matériaux plastiques ne sont pas biodégradables. Tous ceux présents dans l’environnement y restent pendant des centaines ou des milliers d’années. Les macro déchets en plastique sont principalement les sacs, les mégots de cigarette, les ballons, les bouteilles, les pailles et les cotons tiges. Les sacs et les cotons tiges en plastique sont cependant interdits à la vente dans les supermarchés depuis 2020. Les Français sont les troisièmes consommateurs d’eau en bouteille en Europe.

Chaque année plus de 200 millions de touristes viennent visiter la Méditerranée, ce qui représente une augmentation de plus de 40% de la pollution marine pendant l’été. Le bassin Méditerranée concentre 31% du tourisme mondial. Ce tourisme y est balnéaire et se concentre donc largement sur le littoral, déjà surchargé.

Les causes de cette pollution sont connues, il y a évidemment des comportements inciviques sur les plages et en amont un système économique qui vit de la surconsommation. Un excédent de marchandises, une tendance consumériste des êtres humains rendus à consommer tout et n’importe quoi pour assurer la survie de ce système économique. Des entreprises créant des besoins artificiels souvent pour le seul profit de quelques multinationales. Certaines de ces entreprises préfèrent le jetable au durable, cherchent à tout prix à renouveler le plus vite possible leur gamme de produits afin que les consommateurs et les consommatrices les rachètent sans arrêt.

L’urgence écologique doit être au cœur des projets politiques maralpins.

La biodiversité marine se dégrade donc à cause de la surpêche et de la pollution plastique. Les oiseaux de mer choisissent leur nourriture en fonction de leur odorat. Ils prennent alors le plastique pour de la nourriture à cause des algues et des bactéries. L’odeur du plastique induit également en erreur les poissons et les tortues de mer qui choisissent leur proie en fonction de leur vue. Un véritable empoisonnement en silence. Le niveau de protection de l’environnement qui nous entoure et donc la réduction des dégâts écologiques pourrait être un des critères majeurs à prendre en compte pour définir un indice de progrès humain. L’urgence écologique doit être au cœur des projets politiques maralpins. Gérer durablement l’eau notamment par les régies publiques et la dépollution. La problématique des déchets sur les plages, la pollution chimique, la destruction de la biodiversité marine et le changement climatique participent au dérèglement du cycle de l’eau.

Le droit à l’eau est pourtant reconnu par l’ONU mais n’est malheureusement pas une réalité dans les Alpes-Maritimes. Le droit à la mer et à son assainissement doit devenir une réalité sociale et juridique. Cette reconnaissance en tant que droit fondamental effectif passe par une gestion publique et collective.

La gestion des déchets est dans l’intérêt public, non seulement pour protéger des vies et pour des questions de sûreté et de salubrité. La situation politique française risque en revanche de perpétuer celle de l’inaction climatique en raison de l’absence d’une majorité de député.es à l’Assemblée Nationale ayant pleinement conscience de l’urgence écologique en cours. Il est pourtant urgent au niveau national de passer de 30% à 100% de déchets plastiques et réutilisables d’ici 2030.

Une autre cause de la pollution du littoral maralpin est directement liée aux inondations. Autrefois appelés épisodes cévenols, ces phénomènes de précipitations intenses sont désormais, en raison de leur extension territoriale, de leur fréquence et de leur dangerosité, qualifiés d’épisodes méditerranéens. Les conséquences, les impacts et les difficultés posées par la gestion des déchets post inondations sont nombreux. Ainsi, les déchets produits par les inondations ont des impacts directs à plusieurs niveaux : ils représentent tout d’abord un danger pour les vies humaines mais aussi un risque pour la santé et pour la salubrité publique, un risque pour l’environnement notamment en raison du niveau de pollution causé sur le territoire. La rapidité de leur enlèvement est une nécessité. En 2015, lors des inondations à Biot, les personnes se sont retrouvées désemparées, la Brague a débordé et des centaines de mètres cubes de déchets ont dû être enlevés.

La gestion des déchets est dans l’intérêt public, non seulement pour protéger des vies et à des fins de sûreté mais également pour permettre au territoire et à l’économie locale de redémarrer. Le droit européen s’était d’ailleurs saisi de la question de la pollution du littoral lors de l’affaire du naufrage du pétrolier le Prestige. La directive 2005/35 oblige les États membres à se doter de sanctions dissuasives en la matière. Il existe ainsi une compatibilité entre les règles européennes et internationales, les règles internationales étant cependant plus strictes en la matière en raison notamment de la Convention de Montego Bay.

Nous produisons ainsi plus de 360 000 millions de tonnes de plastiques chaque année.

L’accumulation de déchets de toute nature doit cesser, certains étant potentiellement toxiques. Les déchets plastiques sont un véritable fléau et ont des conséquences environnementales terribles. Nous produisons ainsi plus de 360 000 millions de tonnes de plastiques chaque année. En mer Méditerranée, ils grossissent à vue d’œil et menacent la biodiversité, nuisent à la qualité de la chaîne alimentaire et par conséquent à l’avenir des secteurs économiques dépendants de la mer. Il devient dès lors urgent de porter plusieurs propositions susceptibles de contribuer efficacement à la dépollution de la mer Méditerranée, de sanctuariser les écosystèmes marins et d’arriver à la création d’un droit international de la biodiversité marine. La stratégie pour en finir avec la pollution du littoral des Alpes-Maritimes est celle du grand plan de dépollution de la Méditerranée, ce qui suppose une réduction de la quantité de déchets.

Parmi ces propositions, citons l’interdiction du plastique à usage unique, la création d’un lycée de la mer et même pourquoi pas d’une université de la mer dans le département. La France, de par le littoral qu’elle possède sur tous les continents, se doit de devenir la première puissance mondiale de la recherche et de l’éducation dans le secteur maritime. Cela passe par la création d’aires marines protégées en haute mer et par l’augmentation de leur niveau de protection. Citons également l’encadrement du prélèvement de sable marin pour le secteur de la construction et la lutte contre l’extraction illicite à l’échelle nationale, la dépollution des sites affectés par les rejets toxiques des décharges. La France Insoumise au sein de la Nouvelle Union Populaire Ecologique et Sociale d’Antibes Sophia porte ces propositions, elles peuvent être évidemment reprises voire améliorées par d’autres politiques au niveau local, la propreté de la Mer Méditerranée dépassant de très loin les clivages et étiquettes politiques. Les emballages inutiles pullulent, comme les sachets individuels. On peut prendre exemple des paquets de gâteaux avec des sachets individuels pour chacun des gâteaux contenus dans un paquet.

La mise en place d’une structure commune de lutte contre la pollution et de gestion de la dépollution de l’écosystème de la mer Méditerranée se fera évidemment avec les pays riverains. Il convient également de favoriser la diffusion des pratiques dites zéro déchet vers les pays en développement en s’appuyant sur la récupération informelle des déchets. La lutte contre les exportations illégales de déchets suppose de doter les douanes des moyens nécessaires, le trafic des déchets étant l’un des trafics environnementaux les plus lucratifs. De nombreuses actions peuvent réduire la production des déchets à la source. En utilisant des matériaux durables tels que le bois ou l’osier, en privilégiant des matériaux consignés ou réutilisables, on arrive à cette réduction.

Obliger la commande publique à miser sur l’innovation.

Selon Joko, responsable du Project Rescue Océan Antibes, des solutions peuvent être trouvées à travers le tri des déchets, l’autonomie solaire, le fait d’acheter d’occasion, les potagers en permaculture, le tri des déchets. Pour celles et ceux qui veulent, l’engagement citoyen, associatif et la réduction du plastique par le vrac. Le responsable du Project Rescue Ocean Antibes considère que notre planète, nos mers, nos océans ne sont pas une poubelle, que chaque pollueur devrait être verbalisé et que ne pas respecter le cycle de l’eau doit également être sanctionné. Chaque achat peut devenir responsable et il faudrait obliger la commande publique à miser sur l’innovation. Le court terme ne marche pas, il faut voir à moyen ou plus long terme.

La limitation de la progression de la pollution du bassin méditerranéen à l’horizon 2030, prélude à la dépollution, nécessite de considérer les contraintes géographiques et les situations géopolitiques. Ce bassin est un facteur d’unité, la Méditerranée fait partie des éléments les plus importants de la biodiversité planétaire. Les collectivités locales sont en principe les premières à être incitées à agir dans le domaine de l’environnement. D’ailleurs, le département des Alpes-Maritimes s’associe aux actions visant à éliminer les pollutions dans la bande littorale des 300 mètres pendant la période d’été. La collecte des macro-déchets flottants se réalise à l’aide de bateaux nettoyeurs. Ce dispositif comprend également la surveillance aérienne des bandes côtières. Des dispositifs innovants comprenant des filets de récupération des déchets du pluvial sont également à saluer. (4)

L’engagement de multiples acteurs locaux, l’éducation populaire et la prise de conscience de la gravité de la situation peuvent nous permettre d’espérer une issue salutaire à cette problématique de pollution du littoral maralpin. Il est aujourd’hui impératif que les politiques locales s’adaptent à cet enjeu et en fassent une priorité. Il faut pour cela miser sur l’innovation écologique et avoir une vision d’ensemble de long terme.

(1) Rapport de l’UICN – Union Internationale pour la Conservation de la Nature.
(2) Article : La Méditerranée en passe de devenir une mer de plastique ? Paru dans Actu Nautique magazine.
(3) Directive 2005/35
(4) Port Canto, à l’initiative du maire de Cannes M.Lisnard (LR)

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