Organisateur des Assises de la Face et du Cou qui se tenaient jusqu’ici à Acropolis, le Professeur Laurent Castillo estime “incompréhensible” le calendrier de démolition du palais Acropolis.
EDM – Pouvez-vous nous présenter votre congrès annuel des ORL ? Qu’est ce qu’il représente, nombre de personnes, les retombées économiques pour les commerçants, hôteliers et restaurateurs du centre de Nice ?
Laurent Castillo – Créées en 1991, les Assises d’ORL se déroulent à Nice depuis plus de 30 ans. Ce congrès « niçois » se tenait tous les ans, au palais des congrès Nice Acropolis, à la même période (fin janvier début février). Les Assises se sont imposées comme la première manifestation francophone au monde autour des pathologies de la face et du Cou, avec près de 3 500 congressistes au cours de la dernière édition. Elles regroupent désormais ORL, audioprothésistes, kinésithérapeutes, orthophonistes et ouvrent cette année ses portes aux chirurgiens maxillo-faciaux, orthodontistes, chirurgiens oraux et médecins esthétiques. Notre congrès assure, pendant cette période « creuse » au niveau touristique, une occupation à près de 100% du parc hôtelier niçois des 3, 4 et 5 étoiles avec plus de 4 000 nuitées gérées par notre organisateur. Nous avions même réussi ce tour de force d’organiser en présentiel notre congrès, en 2020 et en 2021, avec la mise en place de mesures sanitaires rigoureuses. Une étude de l’IPSOS pour France Congrès a évalué les retombées économiques des Assises pour les commerçants (hôtels, restaurants, shopping, taxi) : les congressistes provenant de plus de 10 pays dépensent plus de 3 millions d’euros pour nos professionnels niçois durant les 3 jours de congrès.
Suite à l’annonce du maire de Nice au sujet de la destruction d’Acropolis, quelle a été votre réaction ? Avez-vous pu trouver une solution de repli ?
La réaction de l’ensemble du Comité d’Organisation, que je représente, a été une déception, liée à la destruction d’un outil encore parfaitement fonctionnel et attractif pour les congressistes. La particulière qualité de l’auditorium Apollon est d’ailleurs soulignée par de nombreux artistes… et par le président Macron lui-même lors de sa venue aux Assises de l’économie de la mer en septembre 2021. Acropolis a accueilli, il y a quelques jours, avec grande qualité et dignité, la diffusion du procès de l’attentat du 14 juillet 2016, dans l’espace Méditerranée, totalement refait à neuf pour l’occasion. Ce qui est incompréhensible, c’est cette chronologie de destruction d’un palais des congrès parfaitement fonctionnel, sans attendre la construction du nouveau palais des congrès au MIN dont la date de mise en service semble être déjà repoussée. Le cahier des charges pour notre manifestation impose, au minimum, 2 amphithéâtres, 18 salles de sous commissions et 3 000 m2 de surface d’exposition : nos seules options « azuréennes » étaient à l’est, au Forum Grimaldi de Monaco, ou à l’ouest au Palais de Cannes, que nous avons rapidement choisi.
“Jusqu’au maire de Cannes, David Lisnard, qui s’est engagé pour nous aider à débloquer certaines situations”.
Quels accueil et moyens ont été mis à votre disposition à Cannes ? N’a-t-il pas été trop contraignant de faire déplacer tous vos invités habitués de Nice vers une nouvelle ville ?
Alors que Cannes est surtout championne des grands salons et des congrès professionnels internationaux, nous avons été accueillis avec un immense professionnalisme… et une vraie volonté, semble-t-il, de développer le tourisme d’affaires lié aux congrès médicaux. De la mairie de Cannes à direction du palais, en passant par l’ensemble des professionnels du tourisme cannois (hôteliers, restaurateurs, taxis…) tous se sont rangés à nos côtés pour la réussite des Assises 2023 ; jusqu’au maire de Cannes, David Lisnard, qui s’est engagé, personnellement, pour nous aider à débloquer certaines situations….
Quels impacts directs et indirects l’absence de congrès à Nice aura sur l’économie locale selon vous ?
Les impacts vont malheureusement être majeurs pour l’économie niçoise, les retombées financières, d’un seul congrès, de taille moyenne comme le nôtre, dépassant les 3 millions d’euros pour l’économie locale. Toutes les manifestations prévues pour 2023 à Acropolis, ont été déprogrammées et ont quitté Nice. Les équipes d’Acropolis ne commercialisent actuellement plus aucun congrès, la solution de la Cuisine à Nikaïa étant malheureusement totalement inadaptée pour la tenue de congrès médicaux ou des salons professionnels. Il faut se souvenir qu’en 2015, Nice-Acropolis a reçu la prestigieuse récompense de « Meilleur Prestataire International », décernée par l’Association Internationale des Organisateurs Professionnels de Congrès (IAPCO) ! En 2019, Nice, grâce au palais Acropolis, était à la troisième place des villes françaises de congrès avec un chiffre d’affaires de 19,3 millions d’euros pour 131 manifestations de tous types (congrès, conventions, séminaires, galas, salons et spectacles) dont 38 congrès et conventions… Il est certain qu’en 2023 nous risquons d’être loin du podium ! Enfin, il est difficile de chiffrer le nombre de congressistes « étrangers » séduits par la beauté et les charmes de notre ville, qui décident de revenir à Nice en famille !
Peut-on espérer retrouver des congrès comme le votre à Nice ?
L’histoire montre que lorsqu’un congrès quitte une ville, le retour est rare ! Cependant nos Assises ont été créées par mon maître, le père de l’École Niçoise de Chirurgie de la Face et du Cou, le Pr François Demard et notre ADN est et restera niçois ! Notre ville présente des atouts majeurs, qui devraient permettre, je le souhaite, une fois le nouveau palais des congrès construit, la reconquête progressive de congrès. Le chemin sera cependant long et le prix à payer particulièrement élevé pour les professionnels du tourisme ….et pour les Niçois !
