Selon la formule empruntée (et détournée) à Maurice Thorez, éminent ennemi du patronat, il faut savoir terminer une guerre. Après quelques années émaillées de tensions au sein des instances économiques des Alpes-Maritimes, l’entente tacite semble avoir été réalisée pour faire table rase du passé en jouant la nouveauté avec l’élection de Pierre Ippolito à la présidence de l’UPE 06. L’homme providentiel, celui auquel incombera la mission de rétablir sinon l’entente cordiale, au moins de remettre la machine économique locale en ordre de marche, est directeur général du groupe familial Azur Trucks, devenu une ETI multi-métiers de 200 millions d’euros de CA et 900 salariés. Depuis le 29 juin officiellement, un peu plus tôt sans doute, il a les cartes en main.
Volontaire ou pas, le choix d’un industriel de tradition familiale est porteur de sens. Un message subliminal, peut-être, pour prendre en compte certaines réalités et faire sort aux éléments de langage et autres tendances de communication qui, en quelques décennies, ont contribué à affaiblir le tissu industriel français pour faire la part (trop) belle aux services et à une prétendue révolution digitale dont notre pays, manifestement, ne détient pas (ou pas encore) les clés ni la culture. Pour rappel, 60% des start-up françaises ne dépassent par 4 ans d’existence.
Les 30 Glorieuses étant terminées depuis longtemps et l’heure étant aux choses sérieuses, il faut avancer en terrain solide. Auparavant, Philippe Renaudi, son prédécesseur, chef d’entreprise reconnu et respecté, et bien que confronté à de multiples crises (attentat de 2016, intempéries en 2017, Gilets Jaunes, tempête Alex, Covid, guerre en Ukraine), avait remis l’UPE 06 en ordre de marche et assaini les finances en triplant le trésor de guerre et en doublant le nombre d’adhérents. Récemment élu à la présidence de la CCI régionale, Philippe Renaudi transmet donc le flambeau à Pierre Ippolito. Lors de sa prise de poste, ce dernier a livré ses axes de travail.
Apaiser : ça, c’est fait. En tout cas c’est acté.
Fédérer : en favorisant l’ouverture et en “clarifiant ” la gouvernance notamment à travers une modification des statuts et des cadres. Même à titre symbolique, c’était une étape obligée.
Dynamiser : n’en déplaise aux romantiques, les révolutions se font par la tête, jamais par la base. Pour stimuler le tissu économique, il faut d’abord dynamiser l’outil associatif d’aide et de services aux entreprises locales, c’est-à-dire l’UPE 06.
Pragmatisme : parmi les formules fortes, “l’UPE n’est pas là pour prendre la CCI en frontal“… Combattre la crise économique et la gabegie politico-administrative en ordre dispersé n’est effectivement pas la bonne méthode.
Cela, c’est pour la stratégie. La tactique, c’est-à-dire le volet concret, est plus parlant. Car contrairement à la politique, qui se satisfait de discours, l’économie ne peut faire… l’économie des actes.
Sur ce terrain d’action, presque un champ de bataille puisque la crise, comme l’ennemi dans le Désert des Tartares, est là et bien là, les objectifs ont le mérite d’être clairement identifiés et désignés (le jeune président, qui selon sa légende urbaine aurait songé autrefois à faire Saint-Cyr, a des accents de chef de guerre) :
Au premier chapitre, le défi majeur : la transition énergétique. Tarte à la crème des idéologues de l’écologie déconnectée et des spéculateurs opportunistes, elle a un sens pour l’économie réelle. Elle à surtout un coût : 35 milliards par an jusqu’en 2050 à la charge des entreprises. C’est lourd. Trop. L’UPE 06 se donne donc pour mission de mettre en œuvre des solutions destinées à accompagner ces entreprises dans cette transition. L’engagement est fort, les résultats pourront se mesurer (décidément, on n’est pas en politique…) Parmi les projets très concrets évoqués, la création d’une centrale photovoltaïque destinée à alléger la facture des entreprises locales. Amazon l’a fait pour son compte, l’UPE veut le faire pour les siens, c’est la différence entre la comm’ et l’engagement.
Autre pilier : le nerf de la guerre, l’argent. Le projet consiste à apporter un service aux entreprises de 10 à 100 salariés en créant un fonds d’investissement économique et solidaire (insister sur “solidaire”) pour contribuer à financer le développement des entreprises du territoire (insister aussi sur “territoire” = terrain= concret) des Alpes-Maritimes (TPE et PME). Avec un corollaire : la création d’une foncière territoriale pour alléger la pression des loyers et investissements immobiliers sur les entreprises.
Et puis des directions plus accessibles sans doute mais pas moins ambitieuses et utiles :
Revaloriser le travail : comme nous avons aimé quelques formules fortes distillées ce jour-là, en voici une autre : “compenser les lacunes de l’Éducation plutôt qu’attendre que l’Éducation se réforme“. Le mammouth appréciera ou pas, et peu importe, l’objectif ici, c’est de relancer l’emploi et la formation, notamment en permettant aux jeunes de trouver des stages autrement que parce que leur père a un copain chef d’entreprise, pour paraphraser encore Pierre Ippolito, qui ne va pas se faire des amis chez les enseignants, sauf peut-être, mais c’est l’essentiel, parmi ceux qui exercent dans l’enseignement professionnel et connaissent le sujet. Et comme il faut que ce ne soit pas seulement facile à dire mais aussi à faire, l’UPE s’engage par la voix de son nouveau président, à faciliter aux entreprises l’accueil des stagiaires.
Promouvoir l’image de l’entreprise : pour le coup on est dans la comm’, mais il en faut aussi. Les idées : relancer le festival du film de l’entreprise ou, plus difficile mais intéressant, créer des partenariats avec les médias pour y intégrer le monde de l’entreprise (l’Echo du Mercantour est preneur).
Pour finir, une mention spéciale pour une préoccupation originale exprimée par Pierre Ippolito : se pencher sur la santé des chefs d’entreprise, un sujet presque tabou ! Car c’est bien connu, seuls les salariés souffrent au boulot. Plus sérieusement, il s’agit de proposer les services d’assistantes sociales et de psychologues aux entreprises en déficit de ressources humaines.
Le nouveau président s’est positionné pour un mandat unique, il y a du boulot. A suivre (de près).
Et pour conclure et marquer cette passation, l’UPE 06 dit au-revoir à Philippe Renaudi avec cette vidéo sympa et décalée
Le nouveau bureau UPE 06 :
Trésorier : Guillaume Cibelly
Trésorière adjointe : Isabelle Willm
Secrétaire général : Thomas Collet
Secrétaire générale adjointe : Lydie Bremond
VP Commerce Syndicats : Gérard Molinès
VP Commerce Adhérents directs : Christophe Tripodi
VP Service Syndicats : Christine Welter
VP Commerce Adhérents directs : Jean-François Puissegur
VP Industrie Syndicats : Patrick Moulard
VP Industrie adhérents directs : Marcel Ragni
Les conseillers du Président :
Frédéric Brossard (Sophia Antipolis-Numérique)
Anny Courtade (bassin cannois)
Léonard Cox (international)
Fabien Giausseran (bassin grassois)
Adina Grigoriu (spécialiste financement)
Laurent Lachkar (Associations-clubs, jeunesse)
Cédric Messina (Relations institutionnelles)
Claire Peradotto (Force de propositions)